Ashley Mareko, responsable du suivi des femmes porteuses dans une agence et contributrice à l’initiative GPA USA partage dans cet article les raisons qui l’ont poussé à devenir mère porteuse et l’état d’esprit qu’elle a adopté pour mener à bien ce projet de vie.
Les raisons de mon choix
Mon mari et moi avons eu trois enfants jeunes. Nous voulions faire une pause, se concentrer sur notre stabilité financière, un projet immobilier,notre santé. Plusieurs années ont passé et lorsque nous avons essayé d’avoir à nouveau des enfants, nous avons diagnostiqué une infertilité secondaire.
Une FIV, coûteuse aux Etats-Unis, n’était pas une perspective réaliste. J’étais en colère du fait de ne plus pouvoir avoir d’autres enfants. Je suis croyante et un jour j’ai entendu dans mon cœur cette question : « pourquoi ne peux-tu pas déjà éprouver de la reconnaissance pour les enfants que tu as ?». Ça m’a touché. Je devais être reconnaissante. J’avais trois enfants magnifiques. Je les adore. Puis : « Comment est-ce possible de ressentir de la colère alors que d’autres n’y arrivent pas ? » C’était un sentiment injuste par rapport à ceux qui ne pouvaient pas avoir d’enfant du tout.
Peu de temps après, j’ai rencontré une femme porteuse à la paroisse. Elle m’a partagé son histoire, je n’en avais jamais entendu parler. J’ai pensé que c’était une façon d’aider. J’ai eu des grossesses et des accouchements faciles, j’allais donc à mon tour aider une autre famille.
Vers une deuxième et une troisième GPA
Ma deuxième GPA a fait suite à la première. La famille d’intention m’a demandé si j’étais d’accord de porteur un autre enfant pour eux.
Pour la troisième fois, ce n’étais pas du tout prévu. Je travaillais alors à l’agence, nous venions juste de commencer, et au début, c’était un vrai défi d’identifier des femmes porteuses. J’étais en contact avec une famille qui disposait seulement d’un embryon. Leur docteur était très strict pour le choix de la femme porteuse et les chances d’implantation de l’embryon n’étaient pas optimales. Qui pouvait consentir à devenir porteuse dans ces conditions-là ? Qui allait devenir leur femme porteuse ? Je me suis dit que ce serait moi.
Mes deux familles d’intention venaient de Chine. Je suis née et j’ai grandi à Hawaii, il y a beaucoup de communautés asiatiques là-bas, je connaissais déjà en partie la culture chinoise. Et je voulais devenir femme porteuse pour un couple de parents internationaux. Je ne me sentais pas de choisir un couple vivant aux Etats-Unis, assez proches pouvoir déjeuner ensemble, sortir. J’ai déjà du mal pour consacrer du temps à mes propres amis, donc je ne pensais pas être en mesure de donner ce qu’ils auraient pu attendre de moi. C’est l’avantage d’une famille à l’international, on construit la relation par messages écrits. C’est plus de liberté aussi pour les RDV médicaux.
Le don de soi comme état d’esprit
C’était une évidence
C’était une évidence. J’ai su que c’était les bons parents d’intention… Dès le moment où je les ai rencontrés. Nous avons pleuré au téléphone, on ressentait un lien, une connexion, même si elle parlait un anglais rudimentaire. Je pouvais lire dans son coeur son désir d’enfant. Nous avons communiqué, pas de manière journalière, mais assez pour construire une relation. Je l’ai herbergée dans notre maison une semaine car son mari ne pouvait être là pour l’accouchement. Quand le bébé est né, la maman est revenue avec nous à la maison. Nous l’avons aidée à prendre en main sa maternité. J’ai tiré mon lait pour le bébé. On l’a emmené en Californie pour les papiers. Une relation très proche, qui s’est intensifiée avec la deuxième GPA. Par la suite, nous sommes allés un mois en Chine découvrir leur univers, et expérimenter la culture chinoise. C’était super.
Avec pour seul dessein, celui de faire grandir une famille
Ma deuxième GPA a été un parcours très différent de mes premiers parcours. Je dis souvent aux femmes porteuses que j’accompagne de se lancer dans une GPA avec pour seul dessein, celui de faire grandir une famille. Et si la famille s’agrandit, c’est une bénédiction. Mais il ne faut pas y aller en se disant que vous vous ferez des amis pour la vie.
J’ai été très chanceuse avec ma première famille. Aucun problème de jalousie, j’ai été la nourrice du bébé à l’hôpital parce que la maman souhaitait le meilleur pour son enfant. Elle n’a jamais été impolie ni jalouse.
Ma troisième GPA est restée secrète dans l’entourage des parents d’intention (je suis consciente que les FIV sont parfois mal-vues dans la culture chinoise). Ils me parlaient peu. J’ai essayé de briser la glace, communiquer, mais on restait à la surface des choses. J’ai dû m’y résoudre et réaliser que j’étais là pour les aider. Peut-être étaient-ils trop occupés ou ne savaient-ils pas construire une amitié ? Il faut toujours supposer le meilleur des gens, supposer qu’ils étaient reconnaissants mais que leur style était différent.
J’étais responsable envers le bébé
A 38 semaines et demi, pour des raisons médicales, le docteur m’a recommandé de déclencher l’accouchement. Le bébé serait plus en sécurité à l’extérieur du ventre, car si quelque chose n’allait pas bien, il était plus facile d’intervenir. Les parents étaient à trois jours de trajet. Nous avons discuté, le docteur leur a parlé. Nous avons débuté les procédures de déclenchement trois fois, à chaque fois, elles ont été interrompues. Les parents étaient contrariés. Mais j’ai réalisé que ce n’était plus pour eux à ce point précis, j’étais responsable envers le bébé. Donc, j’ai mis au monde un bébé en pleine forme. Sa marraine est venue le lui rendre visite le lendemain matin car elle habitait en Californie
Et c’était tout ! Je ne leur ai envoyé un message que pour le premier anniversaire en disant « Hey, Happy Birthday ». Ce n’étais pas mon souhait. Je ne savais comment sa maman se sentait, je ne voulais pas lui rappeler qu’elle n’avait pu porter cet enfant. Je ne souhaitais pas m’imposer dans leur vie et c’est normal, ce n’est pas mon enfant. Mais j’étais trop curieuse de voir la bouille de ce petit bébé !
Le faire avec le cœur
Ça a été un post-partum plus compliqué pour moi, car je n’ai pas pu tourner la page. Je pense que c’est très difficile pour les femmes porteuses qui ne peuvent pas voir la rencontre entre les parents et le bébé. Nous faisons ça, et bien sûr il y a une compensation, mais la majorité d’entre nous le faisons avec le cœur. Nous voulons aider une famille, les voir heureux. C’est un peu comme si on m’avait volé le cadeau de voir cette rencontre, l’émotion et l’amour qu’on a quand on voit son propre enfant pour la première fois. C’est un soin, une façon de tourner la page pour une femme porteuse que de voir le bébé dans le bras des parents. J’ai donc été triste qui’ls ne puissent pas accueillir ce bébé en personne.