Résumé structuré de la décision du 2 octobre 2024 (Pourvoi n° 22-20.883) de la Cour de cassation sur la GPA
1. Contexte
- Demande : MM. [F] et [W] ont sollicité l’exequatur d’un jugement canadien de 2014, les reconnaissant comme les parents de deux enfants nés d’une gestation pour autrui (GPA) au Canada.
- Procédure : Le jugement étranger a été contesté devant la cour d’appel de Paris, qui a refusé l’exequatur. MM. [F] et [W] ont alors formé un pourvoi en cassation.
2. Principales questions juridiques
- Motivation des jugements étrangers : La Cour de cassation a statué que pour être reconnu en France, un jugement étranger relatif à la filiation dans le cadre d’une GPA doit être suffisamment motivé. À défaut, des documents équivalents doivent être fournis.
- Vérification des parties à la GPA : Le juge de l’exequatur doit pouvoir identifier la qualité des personnes impliquées (notamment la mère porteuse) et s’assurer de leur consentement explicite, conformément à l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et à l’article 3 de la Convention de New York sur les droits de l’enfant.
3. Décision de la Cour
- Rejet du pourvoi : La Cour a confirmé que le jugement étranger était insuffisamment motivé, car il ne détaillait pas la participation des personnes mentionnées (mère porteuse, etc.) ni leur consentement.
- Ordre public international : Le non-respect des standards de protection de la vulnérabilité des parties et de l’intérêt supérieur de l’enfant, comme exigé par l’ordre public français, justifie le refus d’exequatur.
4. Conséquences
- Impossibilité d’exequatur : La demande d’exequatur a été rejetée, car les documents produits ne répondaient pas aux exigences de motivation et de conformité à l’ordre public international français.
En résumé, cette décision renforce l’obligation pour les jugements étrangers relatifs à la GPA de respecter des conditions strictes pour être reconnus en France, notamment en matière de consentement des parties et de protection des droits des enfants.
Analyse de la décision de la cour de cassation et impact sur les enfants nés par GPA à l’étranger : Reconnaissance en France de la filiation des enfants nés par GPA
Le 2 octobre 2024, la Cour de cassation a rendu deux décisions en matière de GPA et plus particulièrement en matière d’exequatur des jugements de filiation.
Exequatur des jugements de filiation pour les enfants nés de GPA à l’étranger
Pour la première fois, elle reconnaît l’opposabilité (validité) des décisions judiciaires étrangères établissant cette filiation en tant que telle, sans les assimiler à un jugement d’adoption.
C’est donc la reconnaissance de ces décisions en elle-même qui est aujourd’hui actée par la Cour de Cassation.
Il s’agit d’une avancée importante en matière de sécurité juridique pour les familles.
Pour rappel, pour obtenir l’opposabilité d’une décision en France trois conditions doivent être remplie :
- compétence du juge étranger
- absence de fraude à la loi
- conformité de la décision à l’ordre public)
En matière de GPA, la Cour vient préciser ici la condition du respect de la décision à l’ordre public, quant à la motivation de la décision étrangère.
Le consentement de toutes les parties
La cour précise : le « juge de l’exequatur doit être en mesure, à travers la motivation de la décision ou les documents de nature à servir d’équivalent qui lui sont fournis, d’identifier la qualité des personnes mentionnées qui ont participé au projet parental d’autrui et de s’assurer qu’il a été constaté que les parties à la convention de gestation pour autrui, en premier lieu la mère porteuse, ont consenti à cette convention, dans ses modalités comme dans ses effets sur leurs droits parentaux ».
« En l’espèce le jugement étranger ne précisait pas les qualités des différentes personnes qui y étaient mentionnées ni, le cas échéant, leur consentement à une renonciation à leurs éventuels droits parentaux, la cour d’appel a justement retenu que la motivation de cette décision était défaillante ».
Cela implique que le consentement de toutes les parties, en particulier de la mère porteuse, doit être clairement établi.
Dans son communiqué, la Cour de cassation indique que la motivation de la décision étrangère doit permettre de vérifier :
- « la qualité des personnes mentionnées dans le jugement ou dans les pièces annexes relatives au projet parental ;
- le consentement des parties à la convention de GPA ;
- le consentement de ces parties, et en particulier celui de la mère porteuse, aux effets que produira la convention de GPA sur la filiation de l’enfant. »
Cette décision n’est qu’une étape en la matière puisqu’un projet de convention est actuellement en cours sur la reconnaissance de la filiation des enfants issus d’une GPA.